Johannes Fouquet / Lydia Gaitanou (Hgg.): Im Schatten der Alten? Ideal und Lebenswirklichkeit im römischen Griechenland (= Peleus. Studien zur Archäologie und Geschichte Griechenlands und Zyperns; Bd. 71), Ruhpolding: Verlag Franz Philipp Rutzen 2016, 193 S., ISBN 978-3-447-10450-0, EUR 40,00
Inhaltsverzeichnis dieses Buches
Buch im KVK suchen
Bitte geben Sie beim Zitieren dieser Rezension die exakte URL und das Datum Ihres Besuchs dieser Online-Adresse an.
Nikolaus Dietrich / Johannes Fouquet / Corinna Reinhardt: Schreiben auf statuarischen Monumenten. Aspekte materialer Textkultur in archaischer und frühklassischer Zeit, Berlin: De Gruyter 2020
Johannes Fouquet: Bauen zwischen Polis und Imperium. Stadtentwicklung und urbane Lebensformen auf der kaiserzeitlichen Peloponnes, Berlin: De Gruyter 2018
«À l'ombre des Anciens? », tel est le titre de ce livre où les éditeurs scientifiques proposent de mesurer la distance qui sépare l'idéal hérité des générations grecques antérieures et la réalité quotidienne qui constitue la toile de vie en Grèce romaine, entre le Ier s. av. J.-C. et le IIIe s. ap. J.-C. Le postulat de départ lié à la tradition renvoie l'image du présent des Grecs sous la domination romaine comme faisant pâle figure face à leur passé glorieux.
C'est la mise en questions de cette vision, ses mécanismes et ses déformations que les organisateurs de ce troisième colloque des Sciences de l'Antiquité d'Heidelberg ont voulu explorer. Réunis en novembre 2013, pour échanger autour de dix-sept communications, les congressistes ont articulé leurs réflexions selon cinq thèmes tout à fait prometteurs: le premier repose sur l'idée de devenir Romain, tout en restant Grec, le second explore le devenir de la prestigieuse cité d'Athènes, le troisième repose sur la pratique religieuse et, en particulier, par l'introduction du culte impérial, la quatrième se fonde sur les structures sociales par une approche plus archéologique au travers de l'analyse des sépultures et la cinquième, enfin, est relative aux traditions artisanales et édilitaires.
De cette grande manifestation, les éditeurs ne présentent que onze articles, ce qui est un peu dommage, car la structure initiale n'a pas pu être conservée.
De ce fait, l'article de Francesco Camia, qui donne un vaste aperçu de la pénétration du culte impérial au niveau civique, est le plus général et a été placé en premier. Son travail a consisté en une synthèse de la figure des theoi Sebastoi et leur intégration dans le paysage sacré de la cité. Il reprend ainsi les travaux de Maria Kantiréa et les siens. [1] Il insiste sur les fondements grecs du culte impérial et sur la particularité qui s'y est développée, à savoir que les Grecs ont vite placé ensemble le culte des divi et celui des princes régnants. En conséquence à partir du milieu du Ier s. ap. J.-C., le culte des souverains est déjà largement collectif. Par ailleurs, la figure des empereurs fut introduite dans le panthéon des cités par l'identification ou l'association aux dieux locaux. Il s'en est suivi une intégration et une modification du paysage cultuel. Plusieurs monuments attestent cette évolution, tel le temple monoptère de Rome et d'Auguste sur l'Acropole d'Athènes, situé dans l'axe du Parthénon, le Métroon d'Olympie, devenu un véritable temple dynastique du culte impérial ou encore le Sebasteion d'Érétrie en Eubée qui avait probablement déjà accueilli le culte à Démétrios Poliorcète, le souverain hellénistique bien connu. Enfin, il présente les différents modes d'intégration: l'association cultuelle des theoi Olympioi et des theoi Sebastoi, la substitution, le partage du même autel (synnaoi), le partage d'espace au sein d'un sanctuaire ou la construction d'annexe pour accueillir le culte impérial. Il conclut par une intégration effective du culte impérial et le fait que l'introduction de l'image du souverain n'a pas bousculé les mentalités grecques déjà familiarisées, au sein des cités, à faire une place sacrée à la personne représentant le pouvoir et l'autorité.
La contribution de Georgios Doulfis vise à montrer la richesse artistique de la Laconie romaine et tardive en matière de production de chapiteaux. Sa démonstration repose sur un lot de 27 exemplaires étudiés avec soin. Il révéle que les modèles italiens, comportant acanthes et lotus, ont été adoptés en Laconie, diffusés en Asie Mineure aux IIIe et IVe s., développés en Crète depuis le port de Gythéion. La Sparte de Thucydide a radicalement changé de visage et le luxe s'est introduit dans la cité romaine et tardive, l'usage du marbre ayant connu un grand succès dans la construction de prestige. Les ateliers de Laconie ont su combiner les traditions architecturales grecques et romaines.
Nina Fenn complète cette impression en décrivant l'Athènes romaine demeurée fidèle à ses traditions religieuses et examinant l'évolution de la topographie sacrée. Elle a concentré son analyse sur quatre siècles, entre le IIe s. av. J.-C. et le IIe s. ap. J.-C.
Johannes Fouquet a démontré, pour les sites d'Argos et de Sparte de l'époque romaine que, même en construisant de nouveaux monuments, les citoyens avaient besoin de s'inscrire dans la continuité de leurs ancêtres. Deux édifices sont mis en exergue ici, le théâtre à gradins d'Argos et le sanctuaire d'Artémis à Sparte. Si le phénomène de la continuité de la mémoire des ancêtres se traduit souvent par ce que l'on tend à appeler une «muséalisation» de l'espace urbain, Susan Alcock le décrit plutôt comme le «théâtre de la mémoire». De fait, une mise en scène des monuments leur donne un aspect antique et vénérable dans ce qui est conçu en réalité comme une modernisation par l'embellissement de la trame urbaine et par la compétition qui l'accompagne.
Christian Fron se concentre sur les réflexions liées à la Seconde Sophistique dont il essaie de tirer les enseignements prônés dans la vie quotidienne. Il tente de voir si les objectifs poursuivis ont pour but de surpasser les Anciens ou de se placer dans leur continuité.
L'article suivant, rédigé par Lydia Gaitanou, fait la part belle à un cas précis, l'histoire de Paros, d'où est issu le magnifique marbre que l'on connaît. Un état des lieux de fouilles et des résultats obtenus jalonne le parcours du lecteur.
Mairi Gkikaki a opté pour la représentation des femmes à la période romaine à partir des modèles traditionnels. L'étude des tenues vestimentaires et des modes de représentation permet de mettre en évidence le classicisme d'un certain nombre de portraits d'aristocrates comme celui de Regilla, l'épouse d'Hérode Atticus.
Florian Klauser montre également ce mélange entre éléments pris à la tradition ancestrale en composant une nouveauté; l'exemple qu'il développe est celui des cistophores des petits propylées à Éleusis. L'analyse des sculptures et du sanctuaire est bien révélatrice de ce phénomène.
Jana Mätzschker revient sur le culte impérial en étudiant l'apparition précoce de celui-ci dans les provinces d'Achaïe, d'Épire et de Macédoine, incluant ainsi le mouvement donné par la création de Nicopolis d'Épire, marquant l'acte fondateur de l'Empire par la victoire d'Actium. Sur place, l'autel monumental à la gloire de Rome et d'Auguste, s'inscrit dans une tradition grecque (autel entouré de portiques, création de jeux, les Actia, d'un monument de la victoire et hommage à Apollon Actien).
Ensuite, Caterina Parigi ouvre la réflexion sur l'évolution du Céramique entre le Ier s. av. et le Ier s. ap. J.-C. Elle tente de cerner avec précision les limites et l'évolution spatiale de cet espace funéraire.
Enfin, Anton Telin évoque les visiteurs romains à Athènes aux IIe-Ier s. av. J.-C. Il est dommage que cette présentation n'ait pas été mise en lien avec les travaux d'Éric Perrin-Saminadayar sur ce sujet. [2]
Les contributions présentes dans ce volume tendent à confirmer la modernité de la Grèce d'époque romaine qui sous-tend un mouvement profondément ancré dans la tradition et l'exaltation de celle-ci. Les nouveautés qui apparaissent à l'époque romaine n'altèrent pas le respect des Grecs pour leurs racines, mais au contraire, renforcent leur détermination à ne pas perdre pied avec le substrat culturel qui les caractérise et fait partie intégrante de leur identité.
Notes:
[1] Je citerai ici en priorité les deux livres issus des doctorats de ces chercheurs : Maria Kantiréa, Les Dieux et les Dieux Augustes. Le culte impérial en Grèce sous les Julio-claudiens et les Flaviens. Études épigraphiques et archéologiques, Meletemata 50, Athènes, 2007 et Francesco Camia, Theoi Sebastoi. Il culto degli imperatori romani in Grecia (provincia Achaia) nel secondo secolo d.C., Meletemata 65, Athènes, 2011.
[2] Par exemple, d'Éric Perrin-Saminadayar, Images, statut et accueil des étrangers à Athènes: le tournant de l'époque hellénistique, dans Le barbare, l'étranger: images de l'autre, Yves Perrin et Didier Nourisson (éd.), Travaux du CERHI 2, Saint-Étienne, 2005, 67-91.
Christine Hoët - Van Cauwenberghe